Le cannibalisme consiste à consommer un individu de sa propre espèce. Du fait de la rareté du cannibalisme humain, la littérature scientifique se restreint à des cas isolés à l’image de Dahmer [1], Meiwes [2] ou Sagawa [3]. Afin d’explorer les caractéristiques de patients cannibales, nous avons étudié tous les patients hospitalisés pour cannibalisme à l’UMD H. Colin ces quinze dernières années, soit 5 patients.
Tous sont de sexe masculin (âge moyen 26 ans). Trois patients n’ont pas d’antécédent hétéroagressif. Tous ont des antécédents psychiatriques : trois patients présentent une schizophrénie paranoïde, les deux autres une structure de type perverse.
Dans le sous-groupe de patients schizophrènes, l’acte, non prémédité, semble favorisé par une rupture de traitement ou une prise de toxique. Le délire est au premier plan, ainsi que les perturbations relationnelles avec la victime qui appartient au couple parental, l’acte cannibalique s’intégrant dans un acte parricide, réaction de défense pathologique visant l’annihilation de la victime. Les zones ingérées correspondent à des zones relationnelles.
Dans le sous-groupe de patients pervers, on retrouve une perte du tabou cannibalique. La relation avec la victime est marquée par l’emprise. Un vécu d’humiliation précipite l’acte, qui semble venir restaurer narcissiquement le sujet dans une jouissance destructrice majeure, avec une dimension sexuelle. Les organes ingérés sont choisis (projet de dégustation).
Notre étude a permis d’identifier deux sous-groupes de patients cannibales, distincts sur un plan clinique et dans la dynamique de l’acte. La petite taille de la cohorte ne nous permet cependant pas de généraliser ces données.