Le ralentissement des gains de productivité par tête observé depuis la fin
des années 80 en Europe, et notamment en France, est susceptible de
plusieurs types d'interprétations. Il pourrait refléter un tassement des
gains de la productivité globale des facteurs, une substitution des têtes
aux heures ou un rééquilibrage des productivités apparentes des différents
facteurs de production. L'objet de cet article est de souligner le rôle de
ce mouvement de rééquilibrage, en réponse à une baisse du coût relatif du
travail, notamment peu qualifié.
Dans cette perspective, la baisse des gains de productivité par tête, loin
d'être défavorable, refléterait un enrichissement de la croissance en emploi
dans un contexte de décrue du chômage structurel. Nous illustrons les
mécanismes sous-jacents en nous appuyant sur un modèle d'offre et de demande
de travail à deux qualifications. La versions dynamique du modèle est
calibrée afin de donner une image des évolutions temporelles de la
production, de l'emploi, ainsi que des productivités apparentes des facteurs
en réponse à des chocs de coûts.