Ce texte est le dernier que nous ait donné Denis Richet, quelques mois avant sa mort, survenue brusquement en septembre dernier. Il témoigne du projet qui l'animait : comprendre les ruptures du tissu politique et social de la France moderne. Comme tel il témoigne d'une attitude, que Denis Richet a su enseigner : « Aimer l'histoire pour elle-même… ». Sa chaleur nous manque.
Isoler le fait-barricades de l'histoire générale de Paris est une nécessité et une gageure. Les barricades ne sont pas comme un élément chimiquement pur ; elles supposent une convergence de données historiques qu'il serait fastidieux de rappeler. Je note seulement que la Commune de 1871 a joué un grand rôle dans l'intérêt porté au 12 mai 1588. Dans la Revue des Deux Mondes, dès septembre 1871, A. Maury publiait un article sur «La commune de Paris de 1588». Et Paul Robiquet, en écrivant de 1884 à 1904 ses trois volumes de l'Histoire municipale de Paris, qui demeure la meilleure synthèse accessible, ne manque pas de faire allusion, avec une certaine prudence, au printemps tragique de 1871. Il est, à mon sens, intéressant de constater que l'historiographie actuelle — disons : trentenaire — de la journée du 12 mai 1588 s'est enrichie grâce à des recherches menées par des historiens français et non français. En Union Soviétique, à Lvow plus précisément, en cette partie de la Biélorussie naguère polonaise, où le professeur Lozinsky a mené un travail d'autant plus exemplaire qu'il n'a jamais pu bénéficier du contact direct avec les archives parisiennes; en Israël, où Elie Barnavi, après un long séjour en France, a pu éclairer l'histoire de la Ligue ; aux États-Unis, grâce aux recherches des professeurs Salmon et Ascoli; en France même, les recherches de Robert Descimon ont largement déblayé le terrain.