L'an de grace 1692 marque une date importante dans l'histoire du newtonianisme : cette année-là, le Révérend Richard Bentley, chapelain de l'évêque de Worcester, adressa à l'illustre auteur des Philosophiez Naturalis Principia Mathematica une série de questions concernant les problèmes les plus profonds de la philosophie naturelle que celui-ci avait négligé — ou évité — de traiter dans son ouvrage. Les raisons qui avaient motivé la démarche de Bentley étaient graves. De son point de vue, elles étaient même très graves : il lui était, en effet, échu le redoutable honneur de devoir inaugurer les Boyle Lectures, instituées par une disposition testamentaire du grand et pieux « philosophe chrétien », Robert Boyle. Ces lectures, séries de huit conférences (annuelles), devaient, conformément au désir de leur fondateur, être consacrées à la défense de la religion chrétienne et à la réfutation de l'athéisme, dont les ravages, par suite surtout de l'influence néfaste de Thomas Hobbes, mettaient la foi en danger.