Cet article propose un modèle empirique du recrutement du stock de coquilles Saint-Jacques, Pecten maximus (L.) en baie de Saint-Brieuc (Manche, France). Ce stock présente de fortes fluctuations du recrutement qui rendent inadéquate l'utilisation des modèles traditionnels de la dynamique des populations exploitées faisant appel à un état d'équilibre. Le modèle intègre trois variables: la biomasse féconde, les effets de l'effort de pêche sur les classes d'âge non exploitées et la variable « température ». Les corrélations entre les différentes expressions des paramètres et le recrutement sont systématiquement analysées. Le choix du modèle final repose sur la minimisation de la part inexpliquée de la variance totale. L'impact de l'effort de pèche sur les fluctuations du recrutement est testé sur deux saisons de pêche avant la mise en exploitation d'une cohorte (groupes d'âge 0 et 1), afin d'intégrer le régime d'exploitation dans le modèle final. Cette procédure révèle un effet plus significatif de l'effort de pêche exercé sur le groupe d'âge 0 de la cohorte.
Pour la température, les expressions initialement retenues sont les anomalies saisonnières, définies comme les écarts de température, par période mensuelle ou bimensuelle, par rapport à la température moyenne de la même période.
Les anomalies saisonnières n'ont pas conduit à une explication significative du recrutement; d'autres expressions de la température ont été recherchées. Elles sont définies comme des anomalies saisonnières pondérées par l'anomalie de l'année correspondante et sont appelées résidus thermiques. Les résidus thermiques sont utilisés sur des périodes mensuelles et bimensuelles en valeur algébrique et en valeur absolue. Les valeurs absolues des résidus thermiques par période bimensuelle fournissent les meilleurs résultats lors des ajustements. Seules les périodes contribuant significativement à l'explication du recrutement sont retenues. La détection de ces périodes critiques est faite par un test de FisherSnedecor. Cette procédure conduit à une combinaison multiplicative de la biomasse féconde, de la mortalité provoquée sur le groupe d'âge 0 par l'effort de pêche et des fonctions exponentielles de résidus thermiques en valeur absolue. Deux périodes critiques sont identifiées, la première quinzaine de mars et la seconde de juillet. La correspondance entre les deux périodes critiques d'anomalie thermique et des étapes du cycle de reproduction de l'animal (le début de la maturation sexuelle, la première ponte et le développement larvaire) est discutée. Le fait que les valeurs absolues semblent plus adéquates indique une adaptation de l'animal aux conditions thermiques moyennes du milieu. La température intervient donc comme un facteur régulant la dynamique de maturation sexuelle et de ponte. Sa rétention sous forme exponentielle multipliant la biomasse féconde traduit les fluctuations inter-annuelles de la fécondité réelle de la population.