La catégorie « trouble : symptômes somatiques » du DSM-V répond à une exigence d’intelligibilité et d’acceptabilité du trouble, pour les patients comme pour les professionnels de santé, tout en renvoyant à une réalité éprouvante au quotidien pour les patients qui en souffrent, consommateurs d’examens et de soins médicaux, plus que psychiatriques. Elle recouvre une diversité de configurations, depuis les troubles les plus banals et passagers jusqu’aux manifestations les plus durables et/ou les plus résistantes, voire à celles que l’on peut considérer comme largement redevables aux effets « iatrogènes » d’approches médicales inappropriées ou aux réactions revendicatives de la part de malades ou de leurs associations, à la recherche d’une identité socialement reconnue. Avec le DSM-V, non seulement l’existence d’une pathologie médicale concomitante n’exclue pas le diagnostic, mais la présence de facteurs de stress ou d’anomalies psychologiques n’est plus exigée comme condition nécessaire à la survenue du trouble, ce qui permet de dépasser à la fois l’opposition réductrice entre organique et fonctionnel et la recherche d’une psychogenèse à tout prix. Et pourtant le trouble reste considéré comme un trouble mental, en raison de la place occupée par la rumination anxieuse dans sa définition. Quant aux facteurs psychosociaux, il peut être utile de différencier ceux qui interviennent en tant que facteurs prédisposants, précipitants ou d’entretien, voire de renforcement. Un tel assouplissement dans l’approche du trouble peut permettre d’espérer une facilitation des prises en charges conjointes ou une meilleure efficience des adressages de ces patients auprès d’un spécialiste en santé mentale. Il importe aussi de savoir, contrairement à une idée reçue, que la présence d’une préoccupation somatique n’est pas sans conséquence pour l’avenir somatique, puisqu’elle prédit une mortalité accrue par causes naturelles, raison de plus pour considérer le trouble comme « sérieux » et pour s’engager dans sa prise en charge.