« Curieux petit syndrome », le syndrome de Capgras consiste en un trouble de l’identification des personnes. Il porte atteinte au sentiment de familiarité, renvoyant un inconfortable vécu d’étrangeté. Cela donne une véritable particularité clinique dans la relation et la prise en charge du patient. Partant de la situation de Mme. A., nous entamons une revue de la littérature des caractéristiques sémiologiques et des considérations étiologiques du syndrome de Capgras. Initialement dénommé « illusion des sosies », ce syndrome renvoie à la conviction délirante du patient qu’un ou des proches ont été substitués par un ou des sosies. Ce dernier renvoie un sentiment de persécution d’intensité variable selon les patients. Capgras résume sa description clinique en parlant d’« agnosie d’identification », car « partout le patient saisit la ressemblance et partout il méconnaît l’identité ». La clinique de Mme. A., par ses intrications psychiatriques, biologiques, cognitives et neurologiques, souligne la nécessité d’une approche multifactorielle et intégrative dans la compréhension du syndrome de Capgras. À côté des hypothèses psychodynamiques, deux modèles issus des sciences cognitives se dégagent dans la littérature : le modèle séquentiel de reconnaissance des visages par Bruce et Young et le modèle « à deux voies ». Des modèles ultérieurs tentent ensuite de faire le lien avec les données de neuro-imagerie, notamment fonctionnelle. Issus de ces démarches intégratives, des approches globales du syndrome de Capgras semblent se développer dans les travaux les plus récents de la littérature. Avec une clinique à la rencontre de la psychiatrie et de la neurologie, les questions autour de l’organicité du syndrome de Capgras persistent sans être entièrement tranchées. Ce syndrome demeure néanmoins d’une grande richesse pour le clinicien, tant sur le plan théorique que dans les liens avec le patient et son entourage.