La participation des Autochtones aux institutions démocratiques canadiennes (que ce soit par le vote, le fait de se présenter à une élection ou d’être député ou sénateur) fait l'objet d'un grand débat dans la littérature décoloniale. Certains auteurs considèrent ces actions comme étant incompatibles avec les mouvements d'autodétermination pendant que d'autres les encouragent en considérant que la participation peut bénéficier aux mouvements d'autodétermination. Par un état des lieux de la littérature décoloniale sur ce sujet, cet essai critique constate que cette mésentente entre les auteurs concernant la compatibilité ou non de la participation avec les mouvements d'autodétermination vient d'une acception différente des contours que devraient prendre l'autodétermination des nations autochtones et le processus devant y mener. Ainsi, il existe une première catégorie d'auteurs, que nous qualifions de « tenants de l'autodétermination incompatible ». Ces derniers établissent que l’État colonial d’établissement est totalisant ; il est donc impossible de le changer de l'intérieur. En outre, les sociétés allochtones et autochtones ne partagent pas les mêmes systèmes de valeurs et de pensées. Il en résulte que les mouvements d'autodétermination doivent se concentrer exclusivement sur la résurgence des sociétés autochtones en dehors des institutions de l’État colonial d’établissement. En conséquence, la participation ne peut faire partie du répertoire d'actions pouvant mener à cette résurgence. Cela pourrait même l'empêcher. À l'inverse, une autre catégorie d'auteurs que nous qualifions de « tenants de l'autodétermination relationnelle » considère que c'est justement parce que l’État colonial d’établissement est totalisant qu'il faut prendre en compte ses effets sur les sociétés autochtones. Dès lors, les sociétés autochtones et allochtones, bien qu'ayant des systèmes de valeurs différents les unes des autres, ne sont pas incompatibles : elles peuvent s'influencer. Par conséquent, la participation à ses institutions peut être compatible avec les mouvements d'autodétermination dans certaines conditions.