Céline n’est pas seulement le créateur aussi réprouvé que classique d’une œuvre littéraire éminemment problématique, « Céline » désigne aussi la créature engendrée par la production de cette œuvre. Aussi, comme dans Dr Jekyll et Mr Hyde, est-ce à travers la saisie du rapport de la créature « Mr Céline » à son créateur « Dr Destouches » et de leurs interactions réciproques que peut se comprendre la relation de Céline à la médecine. Tout le rapport de Céline à la médecine relève en priorité d’une posture littéraire. Il est le résultat d’une construction. Mais comme dans le roman de Stevenson, cette construction agit en retour sur le créateur dont elle modifie le parcours contribuant ainsi à la constitution d’une paratopie personnelle où médecine et littérature sont en constante interaction. Ce mouvement de balancier entre médecine et littérature trouve son origine dans une particularité de l’homme : un talent fabulateur et histrionique. Après en avoir dessiné les lignes de force, l’auteur aborde les références culturelles de Destouches-Céline à la psychanalyse et à la psychiatrie. En particulier, celles liées aux notions de rêve éveillé (Freud), d’hystérie (Charcot), de perversion instinctive et de mythomanie (Dupré). La mise en évidence du rôle médiateur joué par les œuvres d’Alphonse et de Léon Daudet permet de conclure sur la complexité des intrications référentielles dans l’œuvre. En se mesurant à Léon Daudet, d’illustre lignage littéraire, sur le terrain de l’hystérie et de la simulation, Céline défie le corps des institutions littéraires et donne la pleine mesure d’une ambition… démesurée.