Cet article présente la synthèse d'une série d'enquêtes réalisées en Ukraine en
1992 et 1993 sur les conséquences psychiques et sociales de l'accident de Tchernobyl,
dans le cadre du “Programme d'évaluation des conséquences de l'accident
nucléaire de Tchernobyl” de la Commission des Communautés Européennes.
Les principaux résultats confirment la puissance de la dynamique
post-accidentelle de cet accident, après plus de sept ans. Près de 3 millions de
personnes sont directement concernées dans leur vie quotidienne par le dispositif
de gestion post-accidentelle qui est à l'origine de nombreux effets pervers aux
plans social et psychique. Au plan économique, le financement du dispositif de
gestion post-accidentelle absorbe chaque année près de 1/6 du budget de l'état
ukrainien. Au plan politique, Tchernobyl est encore un enjeu majeur pour les
différents acteurs du processus de transition institutionnel engagé depuis la disparition
du système soviétique. L'article montre la complexité systémique de la
situation rencontrée sur le terrain et présente les multiples facteurs explicatifs
(physiques, sanitaires, politiques, culturels, historiques) qui sont à l'origine de la
dynamique post-accidentelle. Une modélisation systémique des interactions
entre ces facteurs est proposée. Elle permet de mieux cerner la contribution des
différentes étapes accidentelles et post-accidentelles dans le processus qui a
conduit à la situation actuelle. Elle montre notamment les liens étroits entre les
différentes étapes de l'accident et la nécessité de prendre en compte, dès le
début d'un accident, les conséquences à moyen et long terme qui découlent de
la gestion accidentelle.