Déclaration de liens d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
Published online by Cambridge University Press: 15 April 2020
La situation de la Guyane-Française, département français d’Amérique, est un exemple fort de l’exigence de prendre en compte les paramètres transculturels pour comprendre et agir sur la prévention du suicide. On distingue, dans cette région, la population vivant sur le littoral ayant accès aux principales ressources et la population vivant dans les communes de l’intérieur. En effet, les peuples de la Guyane sont irrégulièrement répartis sur 84 000 km2. Certains villages sont éloignés des structures de soins et de santé parfois de plusieurs jours de pirogues. Les dernières études de l’OMS démontrent que les risques du suicide croissent avec l’éloignement des centres urbanisés. La population résidant sur les deux fleuves de la Guyane et à l’Intérieur (espace forestier amazonien) présente une vulnérabilité au suicide supérieure à tous les autres segments de la société guyanaise et française. Ces suicides sont essentiellement le fait de jeunes. La question du suicide chez les populations autochtones de la Guyane révèle un mal être profond qui dépasse la simple conception médicopsychologique du risque de passage à l’acte. Les causes de ce phénomène sont pluridimensionnelles et regroupent entre autres des facteurs psychologiques, sociaux, anthropologiques, écologiques et politiques. Si les passages à l’acte sont dans la majorité des cas liés à une consommation excessive d’alcool et déclenchés par des motifs au premier abord anodins (différends familiaux, obstacle à l’achat de produits de consommation), ils résultent plutôt de la manifestation extrême d’un mal-être bien plus profond. Pertes de repères liés à la modification brutale des modes de vie, déstructuration de la cellule familiale, inactivité en particulier chez les jeunes, échecs scolaires, absence de perspectives d’avenir et isolement sont des motifs qui peuvent expliquer le comportement suicidaire. Un partenaire majeur dans cette réflexion est le CCPAB (Conseil consultatif des populations amérindiennes et Bushininge de Guyane), instance auprès de la future collectivité unique, siégeant à la Préfecture, spécifique aux DOM, qui fait du suicide des autochtones un axe prioritaire de lutte. C’est une démarche intégrative de ces dimensions pour une évaluation globale avec des outils spécifiques que nous construisons au sein de l’équipe Inserm (Ipsom) à laquelle est adossée la CeRMEPI (cellule régionale pour le mieux être des populations de l’intérieur) créée par le préfet. Cette prise en charge holistique permettra d’aider le travail plus spécifiquement médical de prévention et de soins qui est actuellement effectué par les services de psychiatrie de Guyane grâce aux équipes mobiles et à la CUMP (cellule d’urgence médicopsychologique).
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
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